Kumo. Un village comme un autre. Différentes saisons, toutes aussi monotones. Seules une grande canicule, une tempête, ou une énorme averse, changeant considérablement le paysage ainsi que la conception d'une bonne journée, pouvaient octroyer à la vie dans ce village un peu de panache. Si une quelconque preuve de la force de la nature, ou un autre événement marquant, ne venait pas gâcher la monotonie insoutenable du pays, les jours ici étaient d'un ennui désespérant.
Oh bien-sûr, Juzo ne se faisait pas d'illusion quant aux autres villages ninjas. La vie là-bas devait être tout aussi lamentable pour qui acceptait de la vivre sans tenter d'apprécier la beauté d'un ouragan de passage. Bien que, à Suna ou à Kiri par exemple, la chaleur terrible du premier et les pluies monumentales du second devaient donner à la vie là-bas un mouvement plus prononcé, qui faisait que l'on s'y ennuyait peut-être moins.
Il était si difficile de vivre avec cette famille. Une mère débile, un père faible, tels étaient les géniteurs de Juzo. De plus, son père ne l'aimait même pas. Ou du moins la dernière parcelle d'amour en lui pour son fils s'était-elle retirée le jour ou Juzo l'avait battu en combat singulier. Cela avait marqué la fin de vacances, mais également la fin d'un esprit de famille déjà faible à l'époque. Ce qui était parfaitement égal à Juzo. Il quitterait bientôt cette piètre famille, de toute façon. La seule raiso pour laquelle il restait encore dans le domicile familial était que les minables efforts de sa mère pour garder un lien positif avec son fils apportaient à Juzo un maigre confort. Dont il se passerait, afin d'enfin voler de ses propres ailes.
Le jeune homme marchait dans les rues simplettes du village de Kumo. Peut-être celles-ci apparaissaient-elles belles et originales pour certains, voyageurs en quêtes de paysages ou habitants patriotes, mais pour Juzo, il n'en était rien. Simplement un dédale d'habitations aussi esthétiques qu'un vulgaire bout de pierre. À la différence que le bout de pierre n'avait pas eu besoin de l'aide des hommes pour résister au temps. Le soleil manifestait sa divine grandeur dans les rayons chaleureux qu'il envoyait sur le visage blanc, pur de Juzo. Ce fait apportait une touche étrange à la scène, comme si un feu venu du ciel s'était posé sur de la neige mais, au lieu de faire fondre celle-ci, l'éclairait, valorisant de ce fait son extrême blancheur. Affichant un air rassuré, mais nullement rassurant, le Chuunin marchait en ce jour avec l'intention d'obtenir un poste de garde sur les tours de Kumo.
Juzo passait depuis quelques années déjà ses journées à s'entraîner, ou comme il aimait appeler ça : se distinguer. Se distinguer grâce aux techniques de manipulation de la cendre de son clan. En effet, la maîtrise du Haiton était bien la seule chose pour laquelle il vouait à sa famille une quelconque valeur. Mais Juzo se distinguait avant tout dans le Genjutsu personnel qu'il avait réussi à constituer et à améliorer en accord avec ses techniques Haiton. La fusion des deux talents donnaient au jeune homme un pouvoir unique dont il était évidemment certain qu'il lui donnerait accès à ses moindres désirs.
Avançant de son pas assuré, divin, Juzo put apercevoir en l'espace de quelques instants la bâtiment rond dans lequel il lui faudrait exposer sa demande.
Une seule chose risquait de faire échouer le plan de Juzo quant à son envie de rejoindre les rangs des défenseur : la réunion de recrutement s'était tenue la veille, et le jeune homme ne s'y était pas rendu. Il n'avait pas raté le rendez-vous, non. Il n'avait tout simplement pas encore fait son choix, n'étant pas sûr de vouloir gâcher des journées à côtoyer de faibles et piètres shinobis, dans l'espoir unique de voir arriver un beau jour l'ombre d'un petit affrontement. Il n'avait pris sa décision que le matin même, guidé par l'envie de comparer son pouvoir à celui des autres (il n'avait bien-sûr aucun doute quant à la supériorité de ses capacités), mais surtout par le choix de faire ses preuves, afin d'évoluer rapidement au sein de ce monde.
Il se pourrait très certainement qu'en s'exprimant au sujet de sa demande, Juzo se heurte à un refus. Auquel cas, il partirait sans un mot, sans même menacer l'intervenant, bien qu'il ne soit en aucun autre cas dans sa nature d'abandonner. En celui-ci, ce serait tout simplement la preuve qu'il avait bien fait d'y réfléchir à deux fois, et qu'il était d'une bien trop grande caste pour un si piètre poste.
Quelques pas de plus et le jeune homme entra dans le bâtiment. Devant lui, derrière une table d'une simplicité monumentale, se tenait un homme dont les lunettes d'un noir de geai ne laissaient en aucun cas apparaître l'éclat de ses yeux. Sûrement un lâche, ne voulant pas faire preuve de ses émotions, très percevables par les expressions du regard. L'homme était cependant, ou du moins semblait être, un guerrier chevronné. En effet, la surface de son visage était couverte de quelques cicatrices, vestiges involontaires d'affrontements barbares, et preuve irréfutable que la vie avait manquer de peu quitter cet homme à plusieurs reprises. Le guerrier écrivait sur un manuscrit, dans lequel plusieurs noms étaient répertoriés.
Le Chuunin s'avança vers le shinobi au visage taillé comme du marbre, et voyant la tête de ce dernier se lever, signe qu'il avait son attention, Juzo prit la parole :
- Bonjour. J'aimerais devenir membre des défenses spéciales.
L'homme, âgé d'apparence d'une quarantaine voire d'une cinquantaine d'années, répondit à Juzo sur un ton froid. Mais pas aussi froid que celui du jeune homme, bien-sûr.
- Les inscriptions étaient hier. Pourquoi ne vous êtes-vous pas présenté?
Juzo regardait l'homme dans les yeux, ou du moins dans ses lunettes. Il avait un but bien précis, et n'essuyait pour l'instant pas un refus. Tentant de rendre son ton tout aussi solennel qu'amical (ce dernier point étant plus compliqué à mettre en oeuvre), il répondit :
- Je n'avais tout simplement pas le temps. Mais je suis ici, maintenant. Et la garde a toujours besoin de recrues, non?
Le vieux guerrier fixait Juzo d'un regard soutenu. Le jeune homme avait d'un bon argument la raison du soldat.
- Je n'aime pas vraiment que l'on ne suive pas les règles, et les horaires en font partie. Mais vous avez raison, une recrue est toujours bonne à prendre. J'ai de plus sur moi, et vous avez de la chance, mon manuscrit. Je peux donc vous inscrire. Cependant, bien que j'ai la validation que vous êtes du village grâce à votre bandeau, autour de votre bras, pourrais-je avoir vent de vos talents?
- Bien-sûr. Je suis possesseur et héritier du Haiton du clan Bunta, ou l'art de manipuler la cendre. De plus, je manipule également le Katon, et utilise principalement le genjutsu et le ninjutsu.
Le shinobi aux cicatrices sembla pensif quelques secondes, regardant le manuscrit qu'il venait de ré-ouvrir. Juzo pu voir sur les lèvres de l'ancien qu'il y lisait un nom, avant que celui-ci ne parle.
- Bien, je pense que je sais avec qui te mettre. Vous serez un trio. L'un de tes deux acolytes maîtrise le Fuuton il me semble, ce qui pourrait donner quelque chose avec ton Kekkai Genkai. Quant à l'autre, vous devriez vous complémentariser également. Suis-moi.
Juzo obéit à l'aîné, et le suivit dans une petite série de couloirs et d'escaliers. Après quoi, ils arrivèrent au haut des remparts du village. De là, on pouvait apercevoir à un petite cinquantaine de mètres au nord deux silhouettes. Les collègues de Juzo.
- Comme tu l'as sûrement deviné, voici tes nouveaux camarades. Vous défendrez les lieux ensemble. Explique leur ta situation, et demande leur ce que tu as à savoir sur le poste, j'ai à faire. Je te laisse.
Le guerrier aux cicatrices partit, laissant Juzo seul sur les remparts, tel une marchandise dévouée à la protection de son village. Mais le garçon n'était pas une marchandise. C'était un être puissant, qui allait démontrer l'ampleur de ses capacités, et ceci commencerait avec les deux jeunes shinobis qui lui serviraient "d'alliés". Juzo ne se faisait quant à ces deux personnes aucune illusion, sûr de ne voir en eux que de faibles hommes prêts à mourir pour leur patrie. Ils ne seraient certainement que les sbires du dieu tempête qu'était Juzo, et ne pourraient très certainement faire autrement que de s'agenouiller devant pareille magnificence.
Du même pas assuré que par son arrivée, Juzo se rapprochait de ces deux hommes, faibles images de l'avenir phénoménal qui venait à lui.
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