Infiltration en territoire ennemi

Arriver jusqu'à la frontière fut une longue épreuve pour moi mais la franchir en était une autre. Une ligne imaginaire tracée par les hommes derrière laquelle les restes de mon passé s'y trouvaient. A vrai dire le pays en soi n'avait pas vraiment changé. Un horizon infini composé d'une diversité de paysages. La seule différence que je ressentais était celle présente dans l'énergie qui sillonnait ces terres ; autrefois accueillante et désormais étrange, il était impossible de nier la présence d'une menace dans ces contrées. Ce pays qui jadis brillait grâce à ses citoyens était désormais le cœur du culte et par précaution deux de nos confrères étaient venu nous confier des tenues de camouflage.  Équipés pour poursuivre notre mission nous avions choisi des noms temporaires afin d'éviter de mettre fin à notre mission par pure erreur. Maya incarnait désormais la personne avec qui je voyageais. N'ayant pas l'habitude d'utiliser un surnom fixe en mission je m'étais inspiré de l'être auquel le monde faisait face. Si une personne pouvait s'approprier le titre de «Kami» et terroriser les êtres provenant des quatre coins du monde alors je m'étais senti libre de me nommer «Akuma». Une geste de provocation venant de ma part qui allait sûrement rester entre ma collègue et moi.

A deux nous avancions à notre rythme de village en village tout en prenant le soin de cartographier chaque recoin qui nous paraissait important. Certains hameaux ne m'évoquaient rien tandis que d'autres me rappelaient vaguement quelques souvenirs. Plus nous faisions de la route, plus nous nous rendions compte de l'effet qu'avait eu la maladie sur chaque lieu. Mon regard était familier avec les apparitions de la mort mais les fosses ne cessaient de saisir mon être, comme si les damnés se confondaient pour ne former plus qu'une masse défigurée criant sur toute forme de vie. En voyant ces corps difformes je me disais que ma mort approchait peut-être bien plus vite que je ne le pensais. Ces cadavres délaissés en bord de route me forçaient à pousser mes limites. Malgré la douleur notre voyage me tenait à cœur.

Au fur et à mesure de notre périple dénombrer le nombre de bourgs présents n'importaient plus. Il nous fallait des informations plus concrètes et pour cela nous avions avancé bien plus loin sur ce bout de continent. Ma partenaire me fit part de sa volonté pour récupérer des informations dans un village mais au même moment nous avions été surpris par une vague de migrants. Non loin de nous des troupeaux humains se dirigeaient vers une seule et même direction, sûrement celle qui menait au repaire de cette organisation. Voir ce nombre de personnes se déplacer me plongeait à nouveau dans le passé lorsque j'avais fuit ce même pays pour me diriger vers celui de l'eau. Ce qui à la fois m'irritait et me faisait légèrement sourire était le but de cette exode. Les différentes personnes se marchaient vers l'ancienne grande ville non pour y trouver refuge mais pour guérir grâce à un prétendu dieu.

- Je suppose que comme moi le chemin que ces malades suivent t’intéresse. Ce qu'on pourrait faire serait de les prendre en filature de loin ou alors de près tout en sachant quels risques tu prends. A leurs côtés on pourrait peut être en savoir plus sur les rumeurs ou les informations qu'ils savent et aussi avancer de manière plus discrète en ne faisant plus qu'un avec la foule. Bien sûr je suis ouvert à toute autre proposition.