Des bruits de respiration sèche ôtaient à la nuit sa tranquillité étrange. Une cape noire aux nuages cramoisis fendait l'obscurité, portée par une ombre au dos voûté. Ses yeux rouges brillaient d'une lueur espiègle. Dans son esprit, un désarrois intense. Oui, il était déjà passé par ici. Cela faisait si longtemps maintenant... Si longtemps qu'il en avait oublié le principal : son chemin. Où allait-il vraiment ? Pourquoi ? Avait-il quelque chose à venir chercher en ces lieux ? Depuis quelques temps, il avait perdu tout contact avec les personnes de son organisation, et ce fait l'avait ramené à sa vie solitaire, et poussé à se replonger dans les méandres de son cerveau torturé. Il avait alors ressenti le besoin étrange de revenir dans le pays qui l'avait vu naître.
Il traversa le paysage beaucoup trop silencieux. Même en pleine nuit, l'étrangeté de la scène l'obsédait. Sans doute n'était-ce qu'une impression de ses pensées souillées... Quoi qu'il en soit, il était désormais ici, ne manquait plus qu'à trouver le village. Juste pour voir.
Son masque couvrant son visage, celui qui portait désormais le nom de "Haiko" n'avait plus l'allure d'un homme. Il marchait aveuglément, suivant un inconscient déraillant.
Mais une impression de plus atteint le fantôme aux cheveux blancs. Une sensation intrigante. On l'espionnait, il en était persuadé. Cette sensation aurait parue inquiétante à la plupart des gens, mais lorsque l'on traverse le monde depuis tant d'années, les ombres ne nous effraient plus. Sauf quand elles deviennent choses concrètes.
Haiko l'aperçut. Une silhouette, à quelques mètres de lui. Elle prit une direction au Nord-Ouest, et l'homme pâle se fixa sur ses talons. Même s'il la perdait de vue, le bruit léger brisant le silence de la nuit suffisait à lui faire garder le cap. L'homme de cendre resta sur les talons de l'espion pendant quelques minutes, sa cape brune volant au vent. Il était fou de voir l'avance que parvenait à prendre le poursuivi.
Puis il les vit. Les murailles. Le paysage ne pouvait le tromper, il s'agissait bien de Kumo : le village était devenu une ville forteresse. Comment Haiko avait pu ne pas revenir par ici avant, et ne pas se rendre compte des changements s'opérant chez lui ?
Il ralentit. Il contemplait les murs recouvrant l'endroit si libre qu'il avait connu. Des souvenirs lui revinrent, sa mère. Son père aussi. Il ne regrettait pas, non. Il était atteint de la juste colère qui touche un shinobi dont l'honneur fut bafoué.
Décidé à en savoir plus, il avança vers le village, le coeur battant. Ses yeux rouge fendaient encore la nuit, animés comme jamais. Il était calme.