Mission à deux (première partie)

Les premiers rayons du soleil perçaient à travers les rideaux blancs de la fenêtre, illuminant la chambre d'une clarté chaleureuse. Quelques-uns vinrent même caresser le visage de Kyûji, éclatants sur la peau claire de sa joue, et lorsqu'ils rencontrèrent ses paupières closes, celui-ci, s'éveilla doucement, en clignant des yeux. Il repoussa d'une geste nonchalant l'étoffe qui le couvrait, et s'étira doucement, sentant avec plaisir chacun de ses muscles se tendre avec vigueur sous sa peau. Il se passa la main dans ses cheveux, les coiffant sommairement, puis, encore un peu endormi, se leva. Complètement nu, il se dirigea vers la salle de bain, où il eut tout le loisir de se remémorer les évènements de la veille. Lorsqu'il en ressortit, propre comme les lotus du jardin, vêtu de sa combinaison noire habituelle, il semblait déprimé et songeur.

Il s'assit à une table dans la cuisine, perdu dans ses pensées, et ouvrit la bouche sans prévenir, calme et posé, au moment où sa mère achevait de lui servir son thé :

– Je ne danserai plus. Plus jamais.

Tenten tourna la tête vers lui avec étonnement, reboucha la théière, et la reposa sur la table avant de s'asseoir à son tour.

– Pourquoi donc Kyû ? Tu as pourtant été formidable hier soir, comme à ton habitude... Quelque chose te tracasse ?

– Je n'ai jamais aimé danser. Je l'ai fait uniquement parce que cela m'a permis de travailler ma souplesse, mais... je n'en ai plus besoin désormais. Désolé maman.

Tenten se caressa le menton pendant quelques secondes, puis se leva en souriant : Si tel est ton choix, alors c'est le bon mon lapin ! Je ne suis pas déçue, loin de là, je t'ai trouvé époustouflant hier soir. Maintenant que j'y pense... elle marqua un temps d'arrêt, et se mit à préparer le bol de son fils, tu as pu parler à Saya ? Je ne l'ai pas vue après ton spectacle, et ce malgré la suite qui a été passionnante ! Entre nous soit dit, vous avez fait de l'excellent travail en organisant cette fête, je suis sûr que Shin l'a beaucoup appréciée !

– Ah, euh... et bien... Kyûji fit tourner lentement son thé, et en but une gorgée tandis qu'il cherchait ses mots. Oui, la fête était réussie... Quant à Saya, j'ai pu lui parler... Voyant que le visage de sa mère scintillait de curiosité, il s'empressa de nuancer aussitôt ses propos : Ne va pas t'imaginer quoi que ce soit ! Non seulement je n'ai aucune envie d'en parler, mais de plus, nous n'avons absolument pas parlé de ce genre de... "choses". Cela ne s'est pas très bien passé, maman...

Tenten s'interrompit dans son mouvement, et se mordit la lèvre.

– Oh, Kyûji... je suis désolée... excuse moi, je ne savais pas... je ne pensais pas... Sa voix était teintée de remord et de peine, ce qui le toucha beaucoup. Il se leva, et la prit dans ses bras.

– Ne t'en fais pas... Tu n'as pas besoin de t'excuser maman. Et puis j'ose espérer que cela va s'améliorer, il n'y a pas de raison que nous restions brouillés...

Sa voix s'étrangla, et refoulant ses sentiments, se rassit, les yeux humides. Lorsqu'il quitta la demeure familiale, il n'avait presque rien mangé.