Un jour de repos... pas si réparateur

Un jour de repos...pas si réparateur

Sanako profitait aujourd’hui d’un des rares jours ou elle était autorisée à quitter cette unité de marginaux pour se mêler un peu à la foule, elle n’en pouvait plus de voir toujours les mêmes têtes et ça lui faisait du bien de se déconnecter, elle en aurait déjà sans doute tué quelques-uns sans ce plaisir qu’elle s’offrait actuellement.

L’établissement était encore calme, il n’était encore que tôt dans le matin, la jeune Kunoichi sirotait tranquillement un sirop de grenadine, sa boisson favorite, et observait le patron des lieux faire la vaisselle, à en juger par la quantité il avait sans doute accueilli les poivrots du village hier soir, et s’était probablement joint à eux au regard de la gueule de bois qu’il affichait. La quiétude des lieux fut troublée par le second arrivant du jour. Ce dernier traînait avec lui tout un nécessaire de peinture qui semblait luxueux, il avait un regard hautain qui irritait profondément la jeune Shikigami. Il commanda évidemment une boisson très peu alcoolisée pour ne pas détériorer son image auprès des camarades qu’il irait retrouver par la suite, probablement de son acabit. Assistant à la scène, la Kunoichi ne put réprimer un commentaire :

- Encore un bourgeois qui avait une cuillère en or dans le fondement à peine sorti du ventre de sa mère, c’est navrant.

Il n’y prêta pas attention, semblant snober la jeune femme, ce qui l’irritait encore plus, il dégustait son breuvage en déroulant devant lui une toile, se saisit d’un pinceau et commença à effectuer avec celui-ci des mouvements très précis, Sanako compris donc à qui elle avait affaire. Son intérêt primant sur sa première impression, elle but d’une gorgée le restant de sa consommation avant de se lever et d’aller lui adresser la parole :

- Hé, toi, le Manji, dis-moi ce que tu dessines ?

L’homme releva la tête un instant, dévisageant la jeune femme avec surprise, il lui répondit avec ses manières habituelles malgré que cette politesse fût loin d’être réciproque :

- Et bien voyez-vous jeune femme, je suis en train de réaliser un portrait du regretté Godaime Mizukage. Cette femme avait un charme fou, on lui prêtait une capacité à faire fondre avec ses baisers, sans doute était-ce dû à sa maîtrise élémentaire mais je suis certain que ce devait être littéralement le cas. Tenez, vous me semblez abriter l’âme d’une jeune artiste en herbe malgré votre langage révoltant, admirez donc cette œuvre, ce graphisme sera éternel, c’est tout bonnement de l’art.

De l’art ? Quelque chose d’éternel ne pouvait être de l’art aux yeux de son interlocutrice, et il va de soi qu’elle n’avait pas sa langue dans sa poche, étant de plus très susceptible à ce sujet, elle mit un terme à la conversation :

- La Godaime Mizukage était sans doute très charmante effectivement… mais tu as tort sur toute la ligne, ceci n’est pas de l’art, l’art avec un grand A est éphémère, il est sublime une fois crée mais ce qui magnifie cette perfection est la brièveté de son existence, l’art véritable n’est ni plus ni moins qu’explosion, retiens bien ça.

Sanako n’avait rien trouvé de plus qu’un autre pseudo-artiste ne connaissant rien à son domaine, au terme de cette journée, elle n’avait pour une fois pas vidée sa colère sur lui, pour ne pas endommager le fond de commerce du brave homme chez qui elle venait aussi souvent que possible, mais il n’était pas exclu qu’elle recroise cet homme dans la rue, ce qui n’aurait pas une fin aussi heureuse que cette fois-là.